Editeur : La Salida n°47, Février-mars 2006
Auteur : Susana Blaszko
Roberto Díaz
Un sentiment nostalgique qui peut aussi se danser…
Roberto Díaz parle du Buenos Aires d’aujourd’hui tout en reprenant des thématiques assez classiques du tango. Ses vers et ses chansons proposent un éclairage contemporain de la ville, avec les couleurs qui lui sont propres… Un pari difficile et réussi pour ce poète dont la voix nous va droit au coeur.
Il associe un certain lyrisme à des images poétiques denses et claires. Pas de tonalités baroques ou de philosophie existentielle chez cet auteur né dans le quartier populaire de Avellaneda… La pulsion de la vie, l’émotion rythment ses paroles. S’adressant au bandonéon, instrument emblématique du tango, il l’implore de cesser d’être prisonnier de sa « tristesse » et de sa « nostalgie » : « Je veux te voir comme un enfant qui sourit au soleil… ».
Dans le monde actuel, empli de confusion et de chaos, Roberto Díaz et son complice Reynaldo Martín sont de vrais « militants » du tango, tendresse en plus, sectarisme en moins…
Susana Blaszko
Roberto Díaz
Poète et journaliste argentin, traducteur en langue anglaise et surtout auteur de tangos…
Il a écrit onze livres de poésie, dont deux édités en Espagne et un de chroniques journalistiques. Il a reçu de nombreux prix en Argentine et à l’étranger. En tant qu’auteur de tangos il a obtenu plusieurs prix : Carlos Gardel, Enrique Santos Discépolo et De Boedo al Mundo. Il a reçu également, pour une valse dont il est l’auteur, le troisième prix d’un concours organisé par la SADAIC (Société Argentine des Auteurs et des Compositeurs en Argentine) : Para que Argentina cante.
Son ¦uvre poétique lui a également valu d’être nominé au prix Reina Sofia en Espagne. « Nous avons des poètes de grand talent, des musiques formidables ; nous avons également une tradition qui nous nourrit et un genre très riche dans sa forme et dans son fond ; une danse qui nous représente dans le monde entier… Pourquoi alors ne pas prendre conscience que le Tango doit évoluer et être un témoin fidèle de l’époque (et des époques) où nous vivons », souligne Roberto Díaz, citoyen d’honneur de Avellaneda, quartier populaire et tanguero par excellence de Buenos Aires.
Reynaldo Martín
Chanteur et compositeur argentin. Il a obtenu de nombreux prix en sa qualité d’interprète de tango et de chansons populaires. Il a enregistré des CD et donné des concerts en Argentine, en Uruguay et au Mexique ; Il travaille étroitement avec Roberto Díaz et tous les deux ont obtenu de nombreuses distinctions en Argentine et à l’étranger pour leur ¦uvre.€
Poème de Roberto Diaz
Un fueye sin tristeza
Bandoneón,
no me traigas mas tristezas
ni te acodes a la mesa
donde está la soledad.
Y cantaste las angustias,
las miserias de la mustia realidad.
Bandoneón,
fuiste el eco derrotado
de los pobres y olvidados.
ya dijiste su verdad.
ya compliste con tu oficio
de marchar al sacrificio
por ser fiel y ser de acá.
Estribillo
Hoy te quiero ver distinto
sin el lánguido requinto.
sin rezongos ni gemidos.
Como un pibe que sonríe porque hay sol.
Embarcado en la alegría de la vida,
repartiendo muchas rosas sin espina.
Hoy te quiero Con el funyi en el olodo,
en un tango que me sirva para amar.
Bandoneón,
no te quiero en esa pieza
donde el mate y la tristeza
te quisieron encerrar.
Ni en las pálidas auroras
De la pibas tosedoras y el percal.
Bandoneón. Ya no llora la obrerita.
Ya no hay guapos que transitan
con la mano en el puñal.
Ya cumpliste con tu oficio
De ser mártir del suplicio
Que te impuso la ciudad.
Paroles : Roberto Díaz
Musique : Reinaldo Martín
Un soufflet sans tristesse
Bandonéon,
Ne me déverse plus ta tristesse
Ne t’accoude plus à la table
Où la solitude s’est invitée.
Tu as chanté les angoisses,
Les misères d’une réalité fanée.
Bandonéon,
Echo vaincu
Des pauvres et des oubliés.
Tu as dit leur vérité.
Tu as accompli ton rôle
De te porter au sacrifice
Parce que fidèle et d’ici.
Refrain
Je veux aujourd’hui te voir autrement
Sans cette languide affection
Sans plaintes ni gémissements.
Tel un enfant qui sourit au soleil.
Emporté par l’allégresse de la vie
Eparpillant des roses sans épines.
Je te veux, la caboche pleine d’oublis
Dans un tango qui me fasse aimer
Bandonéon,
Je ne te veux plus dans cette chambre
Où le maté et la tristesse.
Ont voulu t’emprisonner.
Ni dans l’aurore aux pâles reflets
De filles malades et de percale.
Bandonéon. Finis les pleurs de la petite ouvrière
Il n’y a plus de voyous qui rôdent
Le couteau sous la main.
Tu as accompli ton rôle
Martyr du supplice
Que la ville t’imposa.
Traduction de Fabrice Hatem
et Susana Blaszko