7 juin 2020
Je suis consterné par la capacité des bureaucraties publiques à créer des réglementations absurdes qui enferment chaque jour davantage les actes les plus simples de la vie dans un système kafkaïen d’interdictions, de contrôles et de punitions, transformant peu à peu chacun d’entre nous en délinquant potentiel.
Un exemple, pas plus tard qu’hier soir !! Voici l’affaire :
Dans l’odieux monde d’avant, j’aimais bien aller de temps en temps manger une entrecôte dans un petit restaurant de quartier joliment décoré et où j’étais gentiment accueilli.
On n’embêtait personne, le patron et ses employés gagnaient leur vie, et moi, je passais un moment agréable grâce à eux.
Arrive la crise du coronavirus, et le restaurant est fermé du jour au lendemain, comme tous les autres.
Moi, ça va encore, je mange des conserves Monoprix pendant deux mois sur mon balcon et je fais des économies ; bref, je m’adapte sans trop de casse à la privation de liberté.
Mais pour mon restaurateur comme pour tous ses autres collègues du quartier, par contre, c’est la catastrophe : plus un sou de revenu pendant plus de deux mois !!
Il faut d’ailleurs savoir à ce sujet que les aides annoncées à grand fracas par le gouvernement sont en partie illusoires et de toutes manières insuffisantes : par exemple, les loyers commerciaux ne sont pas annulés (ce qui est normal d’ailleurs) mais simplement reportés, ce qui ne fait que décaler le problème ; le chômage partiel des salariés, avancé par l’employeur, tarde à être remboursé par l’Etat ; le « SMIC-corona » des indépendants, conditionné à plusieurs règles compliquées, n’est de toutes manières qu’une misère par rapport à leurs charges courantes.
Bref, la moitié des restaurateurs de ma rue ne s’en sortiront pas ; et, quand ils parlent, on les sent évidement inquiets, malheureux, aigris, parfois désespérés.
C’est le cas, par exemple du petit restaurant mexicain qui organisait des concerts de musique latinos si sympathiques où j’adorais aller. Dans un lieu aussi confiné, les concerts dansants latinos, tu pourras juste oublier dans le merveilleux monde d’après !!! Heureusement qu’il me restera la télé !!!
Début juin, comme la moitié des restaurants et cafés de France avaient déjà crevé, le gouvernement, dans sa grande bienveillance, a quand même autorisé à rouvrir ceux qui avaient survécu. Mais attention, à Paris, seulement en terrasse !!! Faudrait pas quand même qu’ils pensent à utiliser les salles qu’ils louent très cher pour ce à quoi elles sont destinées, c’est-à-dire à accueillir les clients !! Non, ça serait trop simple !!
Evidemment, Stalinette et ses sbires écolos se sont rués sur l’occasion pour faire chier un peu plus les automobilistes.
Donc, non seulement ils ont autorisé l’extension des terrasses sur les trottoirs, mais en plus, ils ont permis aux restaurateurs de s’installer sur la chaussée, à la place du stationnement automobile.
Tout cela a créé une série de désordres : d’une part les trottoirs eux-mêmes deviennent des lieux chaotiques et dangereux pour les piétons, déjà confrontés au comportement anarchique des deux-roues qui y circulent à toute allure au milieu des petites vieilles et des landaus ; d’autre part, Ils voient leur espace de marche réduit par les terrasses.
Mais, en plus, les tables installées sur la chaussée sont désagréables et dangereuses, avec des bolides bruyants qui passent à un mètre de vous !!!
Bref, c’est le bordel organisé par la bureaucratie là où autrefois régnait un semblant d’ordre : on interdit d’utiliser les choses pour quoi elles sont faites (les salles de restaurants, les places de parking), par contre on autorise les gens à utiliser les choses dans d’autres buts que ce pourquoi elles ont été créées (les terrasses étendues sur les trottoirs et les chaussées). C’est à mi-chemin entre Kafka et Ubu, ce truc !!!
Tout cela est inévitablement source de désagréments de toutes sortes, de dangers, d’accidents et de litiges.
Mais heureusement, la police veille, ou bien les agents de la ville de Paris qui se prennent de plus en plus pour la police.
Donc, malgré toutes ces complications, j’étais en train de manger tranquillement, sur une petite table installée sur la chaussée, l’entrecôte que mon héroïque restaurateur était tout de même parvenu à me servir malgré toutes ces complications, quand nous voyons débarquer un véhicule de la mairie de Paris.
Ses occupants, appelés « médiateurs » (ne sais pas au juste quels sont leurs statuts et leurs prérogatives) étaient chargés de s’assurer du respect par les restaurateurs des règles d’occupation de l’espace urbain totalement débiles que les techno-politiques avaient édictées !!!
Après 10 minutes de palabres, ils ont fait preuve d’une immense bienveillance : ils ont prévenu que mon restaurateur devrait enlever les tables mises sur la chaussée avant 22 heures, sinon, c’était l’amende.
Donc, comme il était 9h45, j’ai dû ingurgiter mon entrecôte en vitesse dans les vapeurs d’essence du bus 31 pour lui éviter des ennuis.
On était juste furieux, le patron et moi !!! Ils ne pouvaient pas simplement nous foutre la paix et le laisser me servir mon plat préféré dans sa jolie salle ?? NON, il faut qu’ils compliquent tout et nous rendent la vie invivable avec leurs interventions stupides !!!
Là, j’en ai juste assez, de leurs impôts, de leurs interdictions, de leurs contrôles et de leurs amendes.
J’aimerais juste trouver un pays où on me laissera aller tranquillement manger une entrecôte dans mon petit restaurant de quartier joliment décoré et où je serai gentiment accueilli.
Mais c’est peut-être trop demander ?