Fiction de Peter Chelsom, Etats-Unis, 2004, 106 minutes Un avocat installé mène une vie de famille heureuse, mais assez vide et routinière. Attiré par le visage d’une jeune femme qu’il aperçoit régulièrement à une fenêtre pendant le trajet en métro entre son travail et son domicile, il entre un jour dans un cours de danse. Sa vie en sera transformée.
Shall we dance ?est un remake, dans le cadre d’une grande ville américaine, d’un film japonais du même nom, réalisé en 1996 par Masayuki Suo.
Sous l’apparence d’une comédie de mœurs un peu convenue, il propose une analyse assez fine du monde de la danse de salon et de la psychologie de ses protagonistes.
Le cinéphile ronchon pourra reprocher au film sa morale un peu conventionnelle, mettant en avant les valeurs de la fidélité et de la famille, débordant de bons sentiments parfois un peu sirupeux, et totalement dépourvu de dimension critique vis-à-vis de la société américaine. Le fanatique de cohérence scénaristique se demandera pourquoi monsieur Clark (Richard Geere) se croît obligé de cacher à sa femme (Suzan Sarandon) ses activités bien innocentes de danseur de salon.
Quant à l’amateur de danse de couple, il pourra regretter une focalisation exclusive sur l’univers de la danse anglaise de concours. Il ne sera pas non plus convaincu par l’érotisme caricatural des chorégraphies interprétées par Jennifer Lopez. Enfin, il pourra s’étonner des progrès incroyablement rapide de notre héros, propulsé en quelques heures de cours au firmament de la danse de compétition.
Le film n’en reste pas moins une description très juste de la psychologie des pratiquants de la danse de salon. Le gros garçon timide rêvant de séduire la jolie danseuse dont il est amoureux, la femme mure et désargentée sacrifiant tout à sa passion de la danse, la vieille prof un peu seulette depuis la disparition de son partenaire aimé, le couple si focalisé sur la recherche de la perfection chorégraphique qu’il finit par se détruire, l’homme à la vie ordinaire exprimant sur la piste de danse toute sa sensualité réprimée, sont des personnages fondamentalement vraisemblables, assez bien mise en scène et servis par des acteurs de talent. Mention spéciale pour le détective un peu désabusé engagé par Mrs Clark pour espionner son mari, et qui, séduit par l’univers de la danse, finit par pousser lui-même la porte du cours de Miss Mitzi.
Au-delà de son moralisme gentillet et un peu convenu, le film nous livre finalement une vérité très juste : la danse peut rendre heureux et aider les gens à se réconcilier avec eux-mêmes. Elle peut, bien sûr, déboucher sur l’amour, mais aussi apporter bien d’autres choses, comme l’amitié et la chaleur humaine, la confiance en soi et le dépassement de ses inhibitions, le plaisir de s’exprimer dans une activité à la fois artistique et sensuelle. C’est pourquoi la scène finale du film, illustrant la manière dont la danse a positivement transformé chacun des protagonistes, sonne juste malgré son côté « happy end » un peu mièvre et suscite l’émotion du spectateur.
Fabrice Hatem