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Carnet de Voyage 2011 à Cuba

Du folklore à la danse contemporaine : cent ans de danses cubaines avec la compagnie Ebony

Vendredi 17 juin

« Dans le spectacle Ayer y hoy, nous retraçons l’histoire de la danse cubaine dans ses différents aspects, depuis ses racines les plus anciennes jusqu’à aujourd’hui ». Maybel Linares, directrice du groupe Ebony.

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Beaucoup de nos compatriotes ne connaissent la danse cubaine qu’à travers la Salsa. Quelle erreur ! La danse à Cuba est une passion, presque une addiction collective, qui parcourt tous les lieux, toutes les époques, tous les milieux sociaux et les origines ethniques, pour donner lieu à des manifestations d’une incroyable diversité : danses folkloriques d’origine afro-cubaine ou créole, danses de sociétés traditionnelles, danses de loisir contemporaines aux rythmes constamment renouvelés. Et l’apport cubain a la danse contemporaine, avec des artistes aussi prestigieux que Narciso Medina ou Alicia Alonso, a également été considérable.

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C’est pour rendre hommage à cette immense diversitéque deux chorégraphes, Maybel Linares et Domingo Pau, décidèrentun jour de printemps 2010,autour d’un amical café, de fonder la compagnie Ebony – ébène si vous préférez -. Des parcours complémentaires : Maybel Linares apporte avec elle la connaissance du spectacle de Cabaret. « J’ai travaillé comme danseuse au cabaret parisien sous la direction de Rosa Baquero, la première épouse de Domingo Pau,et j’ai toujours beaucoup admiré le travail de celui-ci », explique Maybel Linares, directrice de la compagnie Ebony.

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Domingo Pau apporte, de son côté, son immense connaissance du folklore cubain : « J’ai toujours aimé m’intégrer dans des projets plus larges que ce que je connais bien, c’est-à-dire l’afro-cubain et la rumba ». Pour compléter l’équipe, ils demandèrent à Esteban Delgado, ancien danseur soliste de danse contemporaineet actuellement chorégraphe, de venir les rejoindre.

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Mais ne croyez pas que la fusion des différents styles ait été une chose aisée, Depuis les premières auditions le 10 mai 2010 et la formation d’une première compagnie, que de difficultés !! Il a fallu, à deux reprises, renouveler presque complètement l’équipe des danseurs, pour des raisons à la fois artistiques et de calendrier. Il n’est en effet pratiquement pas possible pour un danseur de faire partie de deux compagnies à la fois, et certains d’entre eux, qui appartenaient à d’autres troupes comme le ballet de la télévision cubain, ont dû faire un choix. « J’ai moi-même dû abandonner mes fonctions de chorégraphe dans la compagnie Rakatan pour me consacrer à Ebony »,explique Domingo Pau.

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Finalement, une équipe stable de 8 couples de danseurs, venus pour certains d’entre eux de troupes prestigieuses, comme le Conjunto Folklorico Nacional ou les ballets de la télévision et cubaine, et tout titulaires de formations académique de haut niveau (ENA, ISA), a pu être formée.

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L’une des principales difficultés, comme pour beaucoup de compagnies cubaines ne bénéficiant pas d’un soutien institutionnel, fut aussi de trouver un lieu de répétition. La compagnie travailla ainsi successivement au centre sportif JesusMenendez de Pogolotti, dans les salles de danse de la télévision cubaine, au cinéma Paireten face du Capitole, avant d’élire finalement domicile au cinéma Almedia, dans la quartier d’Ataré, à Centro-Habana. Encore les artistes durent-ils avant de commencer à y répéter, réparer eux-mêmes la scène aux planches défoncées.

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J’ai d’ailleurs pu observer, au cours de mes pérégrinations dans La Havane en compagnie de Domingo Pau, que beaucoup de compagnies de danse et de théâtre cubaines ont élu domicile dans d’anciens cinémas de quartiers, aujourd’hui presque tous fermés et désaffectés.

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Autres gros problème : les costumes : « ils ont été dessinés par Eduardo Arrocha, un des meilleurs stylistes de la danse cubaine, avec lequel j’avais déjà travaillé au Mexique » explique Domingo Pau. Mais si les costumes promettent d’être superbes, ils ne sont pas encore livrés. Et c’est même la principale incertitude qui pèse sur la date de la première – qui aura vraisemblablement lieu en Août prochain au prestigieux théâtre Mella – alors que les chorégraphies du spectacle sont pratiquement achevées.

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La préparation artistique a également été ardue : « Une des principales difficultés a été de parcourir la diversité des formes d’expression de la danse cubaine, dans son extrême variété, tout en créant un style unificateur, propre à la companie Ebony » explique EstebanDelgado. Et même si les danseursétaient d’un niveau technique très élevé, ils n’étaient pas forcément familiarisé avec toutes les formes d’expression dansée de Cuba,

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C’est notamment le cas de la danse folkloriques, que beaucoup de ces jeunes artistes ne connaissaient que par quelques cours académiques. « Pour bien danser le Son ou la Jiribilla, il faut savoir dans quelle atmosphère sociale ces danses se pratiquaient, explique Domingo Pau. Et cela, aucun d’entre eux ne le savaient par leur expérience personnelle. J’ai dû leur expliquer la manière de s’habiller, de penser, de se comporter de ces gens. Par exemple, pour aller danser la rumba, les hommes, quoique d’origine très modeste, s’habillaient très bien, avec beaucoup d’élégance, Ils mettaient des boutons de manchette, des chemises bien repassées, des jolies chaussures de marque Amadeo ou Ingelmo. Et, quand ils faisaient le mouvement de lever la main ou de soulever leur pantalon en le pinçant au niveau de la taille, si caractéristiques de la rumba, c’était pour montrer aux femmes leurs boutons de manchette brillants et leurs chaussures soigneusement cirées. Moi, j’ai vu tout cela dans le solar de mon enfance, Las Camelias, dans le quartier populaire d’Ataré. Les voisins s’y réunissaient dans la cour pour danser. »

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‘Si tu ne sais pas ces choses-là, tu ne peux pas bien danser la rumba, car tes mouvements seront artificiels, tu ne sauras pas pourquoi tu les fais. C’est cette expérience-là que j’ai voulu transmettre aux jeunes danseurs. Je leur ai suggéré de demander à leur parents, à leurs grands-parents, d’évoquer les souvenirs de cette époque, je leur ai aussi fait faire un travail d’acteurs, en jouant les personnages du quartier : l’ivrogne, l’amant jaloux, la fille coquète, le vendeur ambulant… Afin qu’ils intègrent dans leurs corps et dans leur danse ces images des années 1950 ».

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Le résultat, d’après ce que j’ai pu voir au cours de plusieurs répétitions du groupe, est très impressionnant. Les danseurs, de très haut niveau technique, maîtrisent avec un naturel apparent une très grande diversité de styles, de larumba à la danse contemporaine, en passant par le Son et le Cha Cha Cha. Ils peuvent aussi, à l’occasion, se transformer avec aisance en acteurs.

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Tout cela donne un spectacle vivant, captivant, avec une esthétique suis generis,d’une très grande originalité. J’espère bien être encore présent en août prochain à Cu ba pour assister à la première du spectacle…. lorsque les costumes auront enfin été livrés…

Fabrice Hatem

(photos reproduites avec l aimable autorisation de la compagnie Ebony)

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