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Historias minimas

Submergés par les Kayserlicks

Austerlitz, 2 décembre 1805, 8 heures

telnitz1 Moi François Renard, sergent au 3ème de ligne, division Legrand, j’avais marché toute la nuit avec ma compagnie pour rejoindre la grande armée devant Brünn. 30 lieux en un jour et deux nuits !!! C’est avec nos jambes qu’il les gagne, ses batailles, le petit tondu !! Et tout ça avec des savates qui te démolissent les pieds plus sûrement que de la pierrre-ponce… Deux heures de marche, puis dix minutes d’arrêt, pendant 40 heures d’affilées ! Même pas le temps de faire chauffer la soupe à la halte… A ce régime, nous avons tous les pieds en sang. Quant à la fatigue : la dernière nuit, celle du 1er au 2 décembre, nous dormions littéralement en marchant.

telnitz2 Et en arrivant à Telniz, pas une seconde de repos : il faut tout suite se mettre en position, pour empêcher les blancs de Kleinmayer, qui descendent de Pratzen, de prendre le village. Diable ! Ils sont nombreux, beaucoup plus nombreux que nous : depuis le jardinet où ma compagnie a pris position, on en voit des milliers avec leurs canons, qui couvrent la prairie du Goldbach ;Qu’importe, nous les tirons comme des lapins, protégés derrière de petits murets.

telnitz3 A ma gauche, un des mes hommes s’est endormi : j’ai du le réveiller à coups de crosse. Il a tiré trois coups, puis s’est assoupi de nouveau, mais pour plus longtemps, avec une balle entre les deux yeux. C’est qu’ils se sont drôlement rapprochés, au dernier assaut, les Kayserlicks. Heureusement qu’une compagnie est venue nous épauler sur la gauche, autrement nous étions tournés, et adieu ma petite Marie à Joinville.

Devant nous, la prairie est jonchée de grenadiers hongrois, leurs tenues blanches couvertes de sang. Ca gémit, ça hurle, mais pas question d’aller les secourir : les autres reviennent vers nous en courant, baïonnette au canon, pour venger leurs camarades.

telnitz4 Avec mes 20 hommes, dont plusieurs blessés, nous n’avons presque plus de munitions. J’ai déjà dû rattraper par le col une bleusaille qui voulait s’enfuir. En plus de mes pieds en purée, j’ai eu le genou écorché par un éclat de biscaïen. Si au moins j’avais un peu d’eau…Bon sang, nous ne tiendrons pas beaucoup plus longtemps, si Davout ne vient pas à notre rescousse. La bataille a l’air bien mal partie : avoir fait tout ce chemin depuis Boulogne pour se faire égorger ici, ce serait vraiment trop crétin !

 

 

 

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