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Le tango dans le monde

Une semaine à Berlin

ImageEditeur : La Salida n°37, février-mars 2004

Auteur : Claudia Zels

Une semaine à Berlin

Je vous jure, ça vous plairait! Moi, j’ai adoré,! Faites-vous donc ce plaisir! Mais je vais vous raconter ma semaine de tango à Berlin depuis le début.

Lundi

Aucun de mes amis à Berlin ne dansant le Tango, c’est donc seule que je débarque Lundi soir au Salon du Soda, dans le quartier Prenzlauer Berg. On sort tard à Berlin, pas la peine d’y aller avant 22 heures. Le Soda, c’est un immense endroit bien chic avec plusieurs bars et dance-floors dans une ancienne brasserie. Après la chute du mur, cet endroit à été consacré à toute sorte d’activités culturelles. D’où le nom « Kulturbrauerei (brasserie de culture). Le Salon, où l’on danse le Tango, est très beau, je suis ravie. Douce lumière, cette musique que je connais si bien, tables basses, canapés agréables, jolie piste de danse pas trop grande, comme au Latina à Paris.

Évidemment, je ne connais personne et je ne m’attends pas tellement à danser. J’ai juste envie de regarder, je prends un verre (vrai verre! pas de gobelets!) au bar, un bar sophistiqué et soigné.

Je mets quand-même mes chaussures de danse – on ne sais jamais – et m’installe près de la piste pour bien voir. Quatre ou cinq couples dansent tendrement, parfois souriant, parfois concentrés. J’ai à peine fini une cigarette, que je suis invitée! Mon dieu! Holger il s’appelle, mon premier danseur berlinois! Je suis – je l’avoue – toute stressée de vouloir bien faire, mais je remarque vite, que nous pratiquons la même danse , c’est du Tango argentin. Je suis rassurée, je me calme, je commence à apprécier.

C’est étonnant, il n’y a pas de cortinas ici, les couples dansent longtemps ensemble. A Paris, on m’avait appris des codes argentins: trois danses, puis on change. Apparemment, ce n’est pas comme ça ici. Je reste dans les bras d’ Holger une pleine demi-heure ! Juste assise, il y a Peter qui se présente. Danse agréable aussi. Puis Michael, et Joachim. On me demande d’où je viens, où j’ai appris, j’ai des compliments bien polis, pas lourds. On me ramène à ma place, on me réinvite. Puis je fais la connaissance de Sandra, fille qui a vécu elle-même un moment à Paris. Nous sympathisons. Je suis ravie de la soirée que je ne m’attendais pas à trouver si chaleureuse.

Elle finit tard, vers 2h30, et oui, il n’y a pas de limites d’horaires pour les bars à Berlin. Par contre, le dernier morceau n’est pas la Cumparsita, mais une valse. Sur l’épaule de mon cavalier, je vois un homme danser en chaussettes. Je dois rire – ça, il ne le feront quand même pas, mes Français …. Autres pays, autres coutumes …

Mardi

Les yeux brillants, pleine d’entrain, je me rends mardi au Ballhaus Berlin (quartier Mitte). Dommage que cet endroit magique et chargé d’histoire(s) soit délabré à l’extérieur. Mais à l’intérieur, on est récompensé: Des tables avec nappes blanches autour de la piste de danse, une galerie en haut, un comptoir bien placé pour s’accouder et observer les danseurs … et : des téléphones sur chaque table pour s’inviter discrètement! Ça, c’est bien rigolo. Evidemment, ce n’est pas si discret que ça : dès qu’un téléphone sonne, tout le monde tourne la tête pour savoir où et d’où … Le seul défaut, c’est que la piste de danse n’est qu’à moitié en parquet, l’autre moitié, est en linoléum, dommage.

Comme hier, les danseurs ne me laissent pas m’ennuyer dans mon coin. Je danse avec Sebastian, bien agréable, puis avec un homme asiatique, bon danseur lui aussi, et puis – Boris! Oh, si je pouvais faire des cadeaux en sentiments de danses, je vous offrirais Boris sans arrêt!
Lovely Boris! Bien qu’il soit plus petit que moi, je prends beaucoup de plaisir avec sa danse ouverte et rigolote, qui me laisse plein d’espace pour le taquiner et coquiner … j’adooore!

Puis, il y a cet homme argentin, qui ne sais pas guider du tout. Dommage, mais ça existe. J’arrête après deux danses minables et me console avec Andreas, bel homme et très bon danseur doux qui ne me lâche plus jusqu’à la fin, avec la cumparsita cette fois-ci.

Mercredi

Mercredi, c’est Clairchens Ballhaus dans le quartier Mitte, la Milonga que Laura Priori a monté. J’aurais aimé y voir Diego Riemer, « El Pájaro », un danseur pro de Tango que vous allez connaître. Il donnait des cours à Paris avec sa partenaire Mecha l’année dernière à Paris
au Le Temps du Tango. Il est aussi DJ à Clärchens Ballhaus. Dommage qu’il ne soit pas à Berlin en ce moment. Il est en tournée à Moscou, ah – la belle vie des danseurs!

Clärchens Ballhaus est la salle de danse la plus vieille et la plus connue de Berlin. La maison existe depuis 1913. A l’intérieur, c’est la folie – plein de monde! Grande piste de danse, des tables autour, style années 30. Bar, évidemment.

Je revois Sandra, ça me fait très plaisir. Nous avons tout de suite une complicité qui me manque souvent chez les filles à Paris. On rigole, on se moque, on admire, on papote … et danse beaucoup. Je suis invitée par un monsieur argentin assez âgé. J’ai adoré danser avec lui, c’est un milonguero comme dans les films, si charmant et rassurant! Puis pas de bol pour une fois, je tombe sur un marin un peu fou, qui danse la Polka sur les Tangos, … quelle torture! Mais Andreas me sauve. C’est un bonheur de redanser avec lui! En plus, il me montre les gens qu’il faut connaître: Gaia, Laura, Constantin, Judith, Johannes. C’est vrai, ils dansent très bien, c’est du baume pour les yeux.

Andreas veut savoir comment ça danse à Paris. Et si les Français sont vraiment si fort comme on dit dans la drague. Je ne sais pas trop quoi lui répondre. C’est vrai, ici à Berlin, les hommes ne me demandent ni un dîner, ni un numéro de téléphone après trois danses. Je demande à Sandra son avis, elle me rassure que les dragues au Tango, c’est certainement partout pareil, sauf peut-être qu’ici, ça se fait après une dizaine de danses! C’est pour ça donc qu’il n’y a pas de cortinas?

Jeudi

Jeudi, j’ai mal aux pieds et ai trop mangé chez ma mère. Mais, recherche oblige, je me traîne quand-même au « Grüner Salon », le salon vert, qui se trouve dans un théâtre, la Volksbühne, dans le quartier Mitte. C’est apparemment LE rendez-vous de la semaine du monde du Tango à ne pas rater. Les canapés sont verts, d’où le nom du salon. Le parquet est en chêne, et j’adore les lustres ovales.

Sandra est là aussi : génial ! Je revois Peter, Johannes, Holger… Je commence à me sentir intégrée dans cette communauté, qu’est-ce que ça va vite! A part Andreas, qui m’offre ses douces danses, c’est un étudiant de Dresde qui est mon meilleur danseur ce soir. Puis, je suis tombée sur le « Terminator », c’est comme ça que les Berlinoises l’appellent. Vraiment pas de chance pour moi, il me bouscule à droite et à gauche, c’est affreux. A part moi, la « nouvelle », la « touriste », aucune fille berlinoise ne danse avec lui, elles savent … Plus tard dans la nuit, un Suabe me prend la tête avec ses histoires d’héritage de maison, je n’en peux plus, je rentre.

Vendredi

Vendredi, je ne sors pas. Trop fatiguée. Je rate le « Walzer Linksgestrickt », il paraît, c’est un des plus beaux endroits pour danser. Well, next time.

Samedi

Mais samedi, j’attaque le Ballhaus Rixdorf dans le quartier Neukölln. Encore une belle, grande, vieille salle. Et tout le monde s’y retrouve de nouveau, j’ai l’impression que les adeptes sortent tous les soirs. C’est juste Boris de mardi que je n’ai plus revu… too bad ! Nous passons encore une très belle soirée. Je me rappelle du Mexicain si parfait, et celui, très sensuel, qui ressemblait à Nick Cave, et le monsieur tout timide, qui sentait bon!, et le graaand blond, qui me fait danser de jolies milongas, et celui, qui parle en dansant, ou encore le jeune homme en chemise de D’Artagnan qui me fait faire au moins 40 huits coupés, et l’autre avec son gros ventre, sur lequel je suis confortablement installée pour tourner en valse… Je rentre vers 3h, fatiguée, mais heureuse.

Dimanche

Je vais au b-flat dans le quartier Mitte. Endroit moderne, mais chaleureux. DJ Jörg Buntenbach y accueille les tangueras et tangueros depuis 7 ans. Il y a un monde fou, probablement, parce qu’il y avait un concert du Trio Mattar. On a du mal à danser, tellement c’est plein. Je me contente de contempler depuis un coin du bar et d’écouter la musique. Souriante, quand je pense aux gens et aux soirées que j’ai vus à Berlin, mélancholique quand je pense que je vais rentrer à Paris demain. Je reviendrai!

Une semaine de Tango à Berlin, et que de bonnes soirées! Les entrées ne sont pas très chères, entre 4,50 et 5,50 euros. Tous les endroits se trouvent au centre de Berlin, d’un accès aisé en métro. Ils sont très bien indiqué sur le site www.tangoberlin.de, en allemand et en anglais. J’étais surprise du bon niveau de danse et de la convivialité des endroits!

Juste, les filles, méfiez-vous du Terminator! Par contre, si jamais vous tombez sur Boris, embrassez-le de ma part!

Claudia Zels

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