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La montée des investissements internationaux dans les services

Editeur : Le nouvel économiste, n°1272, 23 septembre 2004
Auteur : Fabrice Hatem

La montée des investissements internationaux dans les services :
chance ou menace pour la France ?

nouvelecocom Le fabricant de céramique espagnol Porcelanosa a décidé la semaine dernière l’implantation d’une direction générale et un centre logistique à Nantes. Presque en même temps, Clientlogic, filiale du groupe canadien Onex, spécialisé dans le service à distance, a annoncé le recrutement de 200 personnes sur son site de Pont Sainte-Marie, en Champagne-Ardenne. Des cas isolés ? Pas si l’on croît le dernier rapport sur l’investissement mondial de la Cnuced[1], rendu public le 22 septembre dernier. Celui-ci met en lumière l’impressionnante montée de la part des activités de services dans les flux d’investissements internationaux : plus de 70 % aujourd’hui contre moins de 50 % il y a 20 ans. Bien au delà des traditionnelles sociétés de commerce international, on trouve désormais de puissantes firmes multinationales dans les télécommunications, les médias, l’électricité, l’eau, la distribution. Plus de 30 d’entre elles figurent aujourd’hui au palmarès mondial des 100 premières firmes non financières, classées selon la taille de leurs actifs à l’étranger. Citons, parmi les plus grandes, Vodafone, France Telecom, E.on, RWE, Vivendi Universal, EDF, Suez, News Corp….

Les raisons ? Bien sûr, la part croissante – et désormais dominante – des services dans le PIB mondial. Mais il ne s’agit pas là d’un phénomène vraiment nouveau. Pour expliquer l’internationalisation récente des firmes de services, qui s’est produit dans l’ensemble bien après celle des entreprises manufacturières, on doit évoquer des causes plus contemporaines : en premier lieu, la libéralisation d’activités comme les télécommunications ou l’électricité, qui a poussé des firmes autrefois cantonnées sur leur marché national – souvent en situation de monopole – à s’implanter à l’étranger. Dans d’autres cas, comme dans la logistique ou la banque d’affaires, les sociétés de services ont suivi leurs clients industriels à l’international pour pouvoir leur fournir sur place les prestations demandées. Enfin, les progrès des techniques de transport et de communication, l’évolution des réglementations nationales dans le sens de l’ouverture aux investissements étrangers et la multiplication des opportunités d’acquisition ont rendu envisageable l’internationalisation dans des activités où elle ne constituait pas jusque là une tendance naturelle : media , distribution, banque de détail, assurances…

Mais cela n’explique pas encore tout. Comme le montre la Cnuced, c’est aujourd’hui l’évolution même du mode d’organisation des entreprises qui génère de nouvelles formes d’investissement dans les activités de services. Les firmes multinationales commencent en effet à appliquer à leurs propres fonctions tertiaires « internes » les principes de division internationale du travail qui ont déjà fait leurs preuves en matière de production industrielle. Elles implantent certaines de leurs activités administratives ou de recherche, autrefois naturellement localisées dans le pays d’origine, dans les pays présentant les conditions d’accueil les plus favorables. Elles coordonnent ces activités dans le cadre de réseaux transnationaux, comme dans le cas de la logistique, désormais gérée au niveau du continent tout entier par les grandes firmes présentes en Europe.

La compétition entre territoires pour l’accueil des investissements s’élargit donc à de nouveaux types de projets : il faut désormais, attirer, non seulement des usines, mais aussi des centres de recherche, des centres d’appel, des quartiers généraux, des centres de trésorerie ou de maintenance informatique. Il faut aussi éviter que le sites existants ne soient délocalisés vers des destinations off-shore à bas coûts, comme l’Inde ou l’Irlande. D’après Deloitte Research, ce sont 4 millions d’emplois tertiaires qui seraient ainsi aujourd’hui menacés dans les pays de l’OCDE.

Peu d’entre eux, heureusement, ont pour l’instant été effectivement délocalisés, contrairement au cas de l’industrie où la situation est beaucoup plus préoccupante. Car l’internationalisation des services ne constitue pas qu’une menace. Si nous savons nous organiser face à la concurrence étrangère et convaincre les investisseurs de nos atouts, elle peut représenter également une source importante de création d’emplois dans notre pays. Ces activités sont en effet plus attirées, dans la majeure partie des cas, par la qualité de la main d’œuvre ou de l’environnement des affaires que par la faiblesse des coûts salariaux. Elles se localisent donc encore de préférence aujourd’hui dans les pays développés. Au cours des 2 dernières années, d’après l’AFII (Agence française des investissements internationaux), environ 40 % des emplois « internationalement mobiles » créés en France par les firmes multinationales, soit environ 15 000 par an, l’ont été dans le tertiaire d’entreprise. Ils viennent s’ajouter à ceux crées dans les secteurs de services classiques, comme la banque ou le commerce. Points forts de notre pays : la logistique, et dans une moindre mesure, les centres de recherche et call centers. Points plus faibles : les quartiers généraux et les centres de services partagés. Des marchés prometteurs en tout cas, qui pourraient aider à compenser l’hémorragie des emplois dans le manufacturier traditionnel.

Pour une étude complète sur les investissements internationaux dans les fonctions tertiaires en Europe : /2006/08/02/les-investissements-internationaux-en-europe-par-fonctions-2002-2005-juin-2006/

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World Investment Report 2004, The Shift Towards Services, Cnuced, Genève.

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